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L’école : lieu d’action prioritaire pour l’éducation contre le racisme

Les préjugés racistes se transmettent dès le plus jeune âge. L’école représente un espace privilégié pour sensibiliser les enfants et les adolescents. Voici quelques exemples d’initiatives en milieu scolaire qui déconstruisent les stéréotypes, à travers une vision constructive et positive de la diversité culturelle.

Eduquer : une responsabilité collective

Le mois dernier, autour de la journée du 21 mars, proclamée "Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale", des actions pédagogiques dans les écoles, collèges et lycées ont été mises en oeuvre à l'échelle nationale. Coordonnées par l’association Civisme et démocratie (Cidem), elles ont pour objectif de renforcer la solidarité et la fraternité, valoriser la diversité et la tolérance, mais aussi encourager l’esprit critique et combattre le repli sur soi. Pour s’informer, le portail de ressources pédagogiques « Itinéraires de la citoyenneté » met à disposition en ligne un ensemble de textes de références, des outils de sensibilisation, des données iconographiques ainsi que des témoignages et des exemples de projets réalisés.

« On ne naît pas raciste, on le devient ». Cette vérité est la pierre angulaire de la Fondation « Education contre le racisme » créée en 2008 par l’ancien footballeur Lilian Thuram. La fondation intervient en milieu scolaire et universitaire pour démontrer que le racisme est une construction intellectuelle et politique, et invite les jeunes à prendre conscience du poids de l’Histoire dans nos conditionnements identitaires. La fondation a notamment élaboré un outil pédagogique « Nous Autres », programme multimédia d’éducation contre le racisme pour les enseignants et les élèves de CM1 et CM2, qui est envoyé gratuitement aux écoles sur inscription.

Des binômes interculturels pour faire de la médiation dans les écoles

Un travail de déconstruction des stéréotypes et de questionnement des représentations est également mené en milieu scolaire par le programme préventif CoExist. Elaboré en 2003 par une psychosociologue, Joëlle Bordet, et une psychanalyste, Judith Cohen-Solal, CoExist fait une centaine d’interventions par an dans les classes, à la demande des établissements. Fondé sur un partenariat entre les associations l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), SOS racisme et la Confédération étudiante, le programme s’appuie sur un réseau de 80 bénévoles formés. L’intervention consiste en un module pédagogique de deux heures, animés par un binôme de médiateurs issus de milieux et d’origines différents. Le dispositif a été pensé pour permettre l'instauration d'un climat de confiance, sans intervention de l’enseignant-e. Les élèves s'expriment de trois manières différentes : seuls, en petits groupes puis en classe entière. In fine, ils apprennent à construire un argumentaire pour combattre les propos et attitudes racistes, antisémites et xénophobes.

En 2008, Souad Belhaddad, journaliste et écrivain, et Isabelle Wekstein-Steg, avocate, opéraient aussi en tandem. Leurs interventions dans les établissements scolaires de Seine Saint-Denis avaient pour objectif d’aider les professeurs à gérer les conflits religieux et communautaires. L’une est juive, l’autre est musulmane. Dans les classes, elles invitaient les élèves pendant trois heures à s’exprimer et à faire des jeux de rôles, pour questionner de manière stimulante leurs préjugés et les remettre en question. De quoi inspirer de nouvelles initiatives !

La diversité : une chance pour l’école

Si la diversité des origines et des appartenances des élèves peut être une source de tensions, c’est aussi une richesse. C’est ce qu’ont voulu montrer trois femmes, une institutrice, une photographe et une journaliste, à l’origine du projet « photo de classe », en partenariat avec TV5Monde, Courrier international et Bayard jeunesse. En 2012, elles ont réalisé un documentaire avec des élèves de CE2 sur le thème de la diversité culturelle, au sein de l’école Gustave Rouannet dans le 18ème arrondissement de Paris. Pendant un an, l’institutrice Julie Noël a fait travailler les enfants sur leur origine, leur histoire familiale, le racisme et l’immigration, sous forme d’ateliers une fois par semaine. Sous l’œil des caméras d’Estelle Fenech et de Catherine Portaluppi, les enfants ont également interviewé leurs familles pour qu’elles racontent leurs parcours. Pour découvrir cette belle aventure collective « transmédias » : http://www.photo-de-classe.org/#/accueil

Marraine de ce projet, Marie-Rose Moro, pédopsychiatre, est auteure du manifeste "La diversité, une chance pour l’école". Elle déplore que la directive européenne de 2009 qui souligne « l'importance de développer les compétences en communication interculturelle des enfants » ne soit pas encore appliquée en France. Selon elle, l'école doit reconnaître et accompagner la différence des enfants car c'est ainsi que peut naître du lien social et de la fraternité entre eux.

Actuellement à l'affiche, le documentaire "La cour de Babel" de Julie Bertuccelli, est une manignifique leçon d'espoir sur le rôle fondamental de l'école en matière de transmission, de partage et de "vivre-ensemble".